Congos

Le congò est une danse à quatre danseurs

Sujet Danses, Vallée d', Ossau
Support Article html
Auteur Etnopòle occitan (CIRDOC-Billère)
Date 1900
Lieu Vallée d'Ossau

L'origine du mot congò, qui a donné son titre à cette danse, reste à ce jour non élucidée.

Congo

Une danse nouvelle

L'origine du mot congò, qui a donné son titre à cette danse, reste à ce jour non élucidée. Notons simplement que congò reste le terme commun aux diverses appellations rencontrées : marin-congò, marie-congò, menuet-congò, et même manuel-congò.

Le congò est une danse à quatre danseurs (plus rarement à huit, soit deux couples face à face, voire quatre), dit alors barrejat (mélangé) ou en rond, avec dans ce second cas, un nombre indéfini de participants. Mais dans les deux dispositifs avec des évolutions qui rompent radicalement avec l'antique configuration en chaîne. Il s'agit d'une danse non plus destinée à rassembler l'ensemble des membres du groupe autour d'un objectif commun, mais d'un exercice obéissant à d'autres motivations, qui relèvent ici du pur divertissement, ce qui en constitue la nouveauté.

Musiques à danser

Dans leur construction, les supports mélodiques des congòs ne sont pas fondamentalement différents des airs de rondeaux et il est quelquefois malaisé de les différencier. La carrure reste la même, avec des mélodies à deux phrases musicales composées sur des multiples de quatre mesures. Malgré ces similitudes, les congòs ont un répertoire mélodique qui leur est propre, avec quelques airs dominants (Congo de Lucbernet), rencontrés en différents lieux quelquefois éloignés, tels « Au castèth de monsur Montet (« au château de monsieur Montet »), ou « Pour danser le marin-congò, il faut être quatre (...) matelots ».

"Les congòs ont un répertoire mélodique
qui leur est propre."

Ce qui, au passage, semble indiquer que les congòs, dont les mélodies de soutien comportaient des paroles, pouvaient avoir été chanté par les danseurs eux-mêmes, comme l'étaient les rondeaux et les branles..

Territoire

Les enquêtes sur le congò ont permis de définir une zone de pratique qui, vu le caractère tardif des investigations menées, restera parcellaire. Elles font toutefois apparaître que l'usage de cette danse a concerné non seulement une grande partie de la Gascogne non-pyrénéenne (Catarinòta apui sa mair) (à notre connaissance, il a été observé en divers lieux de la Grande-Lande et du Marsan, dans le département des Landes, de l'Armagnac, de la Lomagne, du Savès, de l'Astarac, dans le département du Gers, en Agenais dans le Lot-et-Garonne), mais aussi, rive droite de la Garonne, une aire qui s'étend jusqu'aux marches du Périgord, via les Serres de l'Agenais et le Haut-Agenais (Lot-et-Garonne) (Congò).

Origine

L'origine du congò est à chercher du côté des contredanses anglaises. Ces country dances (danses "de campagne" ou "du pays", mot mal traduit en français, donc), qui sont, à l'origine, des danses pratiquées à la cour, sont signalées en Angleterre dès le règne d'Elizabeth II (XVIè siècle). Mais c'est seulement à la fin du XVIIème s. qu'elles mettent le pied sur le sol français, grâce à A. Lorin " académicien du roi " Louis XIV. Toutefois, ce n'est qu'à partir de la fin du XVIIIème s. qu'elles vont connaître le succès, et ceci non seulement en France mais dans l'Europe tout entière. D'abord réservées à l'aristocratie et aux milieux dominants, elles auront plus tard la faveur des milieux plus modestes, où leur influence sur les pratiques chorégraphiques en vigueur sera importante. Cette innovation majeure qu'est la "figure" - le déplacement des danseurs y est régi par des trajets codifiés - marquera nombre de danses déjà existantes, jusque-là ordonnées selon un dispositif plus simple : les bourrées en Aubrac, les jabadaos en Bretagne, les avant-deux en Poitou.

"Le déplacement des danseurs
y est régi par des trajets codifiés."

Dans le sud-ouest de la France par contre, il semble que l'arrivée des formes issues de la contredanse n'ait ni modifié les danses préexistantes – les branles (ou rondeaux) en particulier, qui resteront attachés à la configuration en chaîne ouverte – ni mis un terme à leur usage, comme cela a pu être le cas sous d'autres latitudes. Les congòs vont simplement constituer un élément supplémentaire des répertoires autochtones, tout comme le feront à la même époque (fin XVIIIè s., première partie XIXème s.), les quadrilles, eux-mêmes héritiers des pot-pourris de contredanses en vogue à la cour de Louis XVI, adoptés ensuite par les milieux populaires sur la quasi-totalité du territoire de l'hexagone.

Forme et esprit

Au côté grave et obligé des branles où chacun s'inscrit, au même titre que ses voisins, dans un dispositif commun réglé par un seul et même pas infiniment répété, le congò va opposer un autre type d'exercice, en rupture, tant dans l'esprit que dans la forme, avec ce qui présidait jusqu'alors à la danse communautaire.

L'évolution des mentalités permettant de sortir de la réserve que la danse exigeait jusque-là (nous sommes au-delà de la période révolutionnaire de 1789), il est désormais possible de s'adonner sans retenue au plaisir du jeu.

"Le jeu peut aller jusqu'à mimer
la poursuite amoureuse."

Qu'elle soit ordonnée selon un cercle ou selon un carré, la chorégraphie y invite. Elle prévoit, grâce aux figures qu'elle propose, des rencontres et des échanges avec d'autres danseurs, ces échanges prenant désormais en compte la distinction entre les sexes. Et pour peu que le dessin chorégraphique s'y emploie, le jeu peut aller jusqu'à mimer la poursuite amoureuse, cavalier et cavalière dédaignant alors leur partenaire initial au profit de la contre-cavalière et du contre-cavalier, avec qui peut s'engager un dialogue dansé, délibérément ludique, voire érotisé (formes de Captieux et Luxey, en particulier).

Quant aux pas, ils ont suivi l'évolution des répertoires. Au départ empruntés aux danses du fond ancien – certains congòs resteront fidèles jusqu'au bout au pas local du rondeau - , ils sauront plus tard, lorsqu'elle apparaîtra au milieu du XIXème s., tirer profit du côté très « commode » du pas de la polka.

Le Congò aujourd'hui

En définitive, les congòs nous livrent une photographie de la danse en Gascogne (et pays limitrophes), à un moment donné de son histoire. En cette époque, où l'Ancien Régime a dû céder sa place, l'évolution de la société traditionnelle, et des mentalités qui la régissent, permet désormais aux danseurs, grâce au renouvellement des répertoires qui accompagne cette évolution, de s'adonner publiquement à des danses conçues avant tout pour être récréatives.

"Les congòs nous livrent une photographie
de la danse en Gascogne."

Aujourd'hui, dans les milieux qui oeuvrent à promouvoir les danses issues des traditions, le congò jouit d'une faveur grandissante. Et ceci bien au-delà de son aire initiale d'usage, tant il est désormais évident que les danseurs et les musiciens vont puiser là d'abord où les guide leur passion, laquelle, à la faveur d'échanges de plus en plus structurés, se déploie tous azymuths. Certaines formes de congòs en particulier (les formes recueillies à Luxey et Captieux, par exemple) sont en passe de devenir des «incontournables», dans les répertoires des bals dits « traditionnels » de nombreuses régions françaises et pays proches (Belgique, Italie, ...).